Prendre en compte le travail dans les négociations sur la formation professionnelle, un objectif difficile à atteindre ?
Michèle Tallard  1  
1 : Institut de Recherche Interdisciplinaire en Sciences Sociales  (IRISSO)  -  Site web
Université Paris IX - Paris Dauphine
Place du Maréchal de Lattre de Tassigny 75775 PARIS Cedex 16 -  France

Le nouveau dispositif en matière de formation professionnelle tout au long de la vie constitué par l'accord national interprofessionnel du 13 décembre 2013 et la loi du 5 mars 2014 constituerait, selon ses protagonistes paritaires, les pouvoirs publics et de nombreux experts, une rupture majeure dans le système de normes de la formation professionnelle en y faisant enfin entrer l'activité de travail. La levée de l'obligation fiscale couplée avec l'introduction du compte personnel de formation et l'ensemble des procédures afférentes (entretiens d'évolution professionnelle tous les deux ans, bilan d'évolution tous les 6 ans, conseil en évolution professionnelle...) se traduiraient par un véritable investissement des entreprises dans la formation dans la mesure où ces nouvelles obligations leur permettraient de prendre en compte et de reconnaître la réalité des processus d'acquisition des compétences. Parallèlement, les salariés, s'appuyant sur ces nouveaux droits, seraient pleinement en mesure de développer leurs compétences pour construire leurs parcours.

 

L'objectif de cette communication est d'interroger cette affirmation, autrement dit d'analyser d'une part, les « traces » de l'activité de travail dans le système fondé en 1971 et ses évolutions jusqu'à l'accord de 2009 et d'autre part, de tenter de distinguer les « ruptures » introduites sur ce plan par le nouveau dispositif. Au delà d'une revue des logiques de construction et d'évolution du système en vigueur afin de débusquer la place effectivement prise par l'activité de travail, une attention particulière sera portée aux certifications de branche. En effet, dès 1983 et l'élaboration des dispositifs d'alternance, il s'agissait de rapprocher les formations des besoins réels en qualification des entreprises, les diplômes étant considérés comme trop éloignés de l'activité de travail. La construction des certifications de branches articulée à l'approche par les compétences visait à saisir les savoirs et savoirs faire construits dans l'action en s'appuyant notamment sur des référentiels d'activité et sur des processus d'évaluation paritaire en situation. On se propose donc de rappeler dans un certain nombre de branches les processus de construction de ces certifications professionnelles ainsi que les outils sur lesquels s'est appuyé ce développement des certifications en ayant pour objectif de cerner, notamment dans l'activité des commissions paritaires nationales de l'emploi (CPNE) et de leurs sous-commissions, les modes de prise en compte de l'activité de travail.

 

Le compte personnel de formation devant être opérationnel au 2 janvier 2015, les acteurs de branche ont déployé au cours du second semestre 2014 une intense activité pour faire émerger à partir de ces certifications, des « briques de compétences[1] » cohérentes correspondant aux droits ouverts par le compte personnel de formation. Dans ces mêmes branches, on analysera donc les processus à l'œuvre, les acteurs mobilisés et l'outillage sur lequel ils s'appuient, en tentant d'identifier les éventuelles ruptures dans les modes de prise en compte de l'activité de travail.

 

A partir de la confrontation de ces deux phases d'analyses, on pourra s'interroger en conclusion sur la signification, au delà de l'enjeu de la formation professionnelle tout au long de la vie, de la prise en compte de l'activité de travail dans les processus de négociation.

 

 

 

 

 

 


[1] Cette expression a été employée lors du séminaire « Formation et parcours » organisé par la DGEFP (5/11/2014) par la responsable de la formation de la fédération patronale des entreprises du médicament



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